“Dessine-moi un mouton…”
S’il n’existait pas, il faudrait vraiment l’inventer! S’il n’existait pas, cet article n’aurait pas lieu d’être! Finalement on ne le remercie jamais assez ! Il va pourtant partager et même donner aux hommes ce qu’il a de plus précieux: sa toison!

Mouton Boujaâd
MERCI, mouton !
Siroua! Tu es blanc ou noir, tu vis au sud du Maroc dans les montagnes du Jbel Siroua, point culminant de l’Anti-Atlas. Ta laine est la meilleure, la plus douce et soyeuse.

Moutons Siroua
Sardi, Boujaâd, Beni Guil, Blanche des montagnes, D’man, Saghro, Beni Hsen… vous vivez en troupeau dans toutes les régions du Maroc, vous vous laisserez tondre une fois par an. Votre poil long et lisse fera naître une laine idéale pour le tissage. Merci moutons!

Mouton Sardi
La naissance d’un art
Au commencement du tissage, il y a bien des siècles, il y avait seulement l’utilité, la nécessité pour les montagnards des tribus Amazigh de se réchauffer, de se recouvrir de couvertures, de s’isoler du froid et du chaud, de s’abriter, de couvrir les sols et les côtés de l’intérieur des tentes… Le métier à tisser était souvent placé au centre de la pièce ou de la tente chez les nomades. La tisseuse continuait ainsi à diriger son ménage. La préoccupation esthétique et artistique arrivera plus tard lorsque se développeront les échanges avec d’autres peuples et les premières interactions commerciales. Avec cette volonté de faire du beau, c’est aussi un langage qui apparaît. Les signes symboliques, les motifs géométriques, les représentations stylisées de la nature ou du monde animal, racontent parfois des légendes, expriment le rapport à la terre, au ciel, aux astres, évoquent les thèmes de la famille, de la vie et de la mort, de la virilité, de la féminité, de la fertilité, de la spiritualité…

Tapis Akhnif au Riad Dar Taliwint
Le déchiffrage en devient parfois complexe. Une part de mystère est toujours inscrite dans le tapis! Traditionnellement ce sont encore les femmes qui exercent l’art du tissage pour créer ces tapis qui font la fierté de tout un pays depuis si longtemps et qui ont aussi séduit le monde entier. Elles y mettent toute leur patience, leur précision et sans doute leurs messages secrets… Les tisserandes peuvent parler de leur environnement mais aussi de leur monde intérieur.
Il va de soi que chaque tapis fait main est une œuvre d’art unique. Un jour un acheteur aura le coup de foudre, pour les couleurs, les lignes, la matière, les motifs. Il en saisira le langage et le fera sien. Comme devant un tableau de peinture, c’est tout un univers sensible qui s’ouvrira à lui.
La Laine
Le matériau essentiel du tapis marocain, amazigh, berbère est donc la laine. Parfois des poils de chèvre, de dromadaire, des fils de coton et même de soie ou de sabra viennent s’emmêler mais chut!
Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes: le tapis marocain est fait de LAINE!
Une fois la tonte achevée (une fois par an), la matière est lavée soigneusement puis cardée, peignée, pour démêler les fibres. Puis on procède au filage pour obtenir des fils de différentes épaisseurs. La géographie, le milieu naturel, l’alimentation, et même la partie du corps tondue jouent un rôle dans la qualité et la diversité de la laine.
Les couleurs
Il est d’abord important de comprendre que la couleur dans l’art du tapis marocain n’existe que pour elle même. Elle ne représente jamais la couleur de quelque chose. Elle est un élément en soi de l’ornementation, du décor, du langage, et de la matière. Elle est donc souvent pleine, crue, intense, vive, saturée avec toutes les nuances que cela implique. Les couleurs gardent donc leurs valeurs symboliques culturellement validées.
Bien sûr de nombreux colorants synthétiques sont disponibles mais au Maroc les teintures à base de plantes tinctoriales sont encore largement répandues dans l’élaboration du tapis artisanal.
Le processus de la teinture se déroule en plusieurs étapes complexes jusqu’à obtention de la couleur rêvée. L’emploi de colorants naturels locaux, outre le respect de l’environnement, perpétue la tradition, la qualité, l’histoire d’un art séculaire, l’ancrage dans une région et dans une identité culturelle forte.
La symphonie des couleurs peut commencer. Des magiciens mélodistes vont être à la baguette!
Pour les rouges, les oranges et les bruns et toutes leurs nuances on utilisera la cochenille, la garance, le henné, le sumac, l’écorce de chêne. Pour les bleus, l’indigo ou le pastel des teinturiers. L’écorce de noyer ou de chêne pourra engendrer des beiges ou des gris. Les jaunes naîtront du réséda, de la gaude, de l’écorce de grenade, du safran, du daphné garou. Sulfate de fer et grenade feront un noir dense. La liste n’est pas exhaustive d’autant que les fixateurs ou mordants comme l’alun, le fer, le cuivre, la cendre de bois, les bains d’oranges amères broyées, de jus de raisins sauvages, de sucs d’oseille viendront perturber, mais pour mieux les pérenniser, les palettes.
Et que le tapis soit!
Cette laine une fois traitée sera donc nouée, tissée ou brodée sur les métiers à tisser.
Le tapis tissé à plat sera plus fin, léger, sans poils. Il peut aussi s’accrocher facilement aux murs comme un tableau. Un tapis tissé à la main sur le métier n’est pas toujours parfaitement rectiligne. Cela ne doit pas vous rebuter.

Tapis Akhnif Dar Taliwint
Le tapis noué sera plus ou moins épais, avec des poils plus ou moins longs, et naturellement plus lourd. C’est le tapis douillet par excellence sur lequel on a envie de se lover.

Beni Ouarain Dune Galerie
Dans tous les cas, les broderies s’y ajoutent en motifs ornementaux.

Tapis Glaoua 3 techniques Dar Taliwint
La tisserande pourra créer son tapis avec une seule technique mais plusieurs modes peuvent aussi être juxtaposés pour créer en surface des reliefs et des effets particuliers. Selon l’inspiration et la tradition!

3 techniques: tissé, noué, brodé Dune Galerie
Le Kilim ou Hanbel est un tapis tissé à plat. Il est souvent léger, de taille et de styles variables. Il peut servir de tapis de prière dans ses petites dimensions.

Kilim style Zemmour Dune Galerie
Un achat pour la vie!
Faut-il rappeler encore une fois que chaque tapis est une œuvre unique! L’achat d’un tapis est aussi un achat pour la vie! Votre tapis, s’il est bien entretenu, est fait pour durer longtemps…longtemps…
Jamais aucun marchand ne s’exaspérera devant vos hésitations, vos doutes, vos états d’âme quant à la couleur, la dimension, le rendu, le style et le langage d’un tapis et le prix final! Au début, il vous aura d’ailleurs déballé un maximum de pièces pour que le choix soit large puis il en éliminera au fur et à mesure de vos décisions. Le bleu me plaît , oui mais le rouge aussi, à moins que le blanc et noir…
Ce n’est pas si souvent que l’on fait ce genre d’acquisition. Une fois le tapis installé dans votre intérieur, vous partirez pour un long compagnonnage avec un objet qui vous suivra au gré des changements de votre vie! Ça n’est pas rien!